CCF : une marque ne meurt jamais

Après s’être effacée sous le nom HSBC France pendant 20 ans, la marque centenaire CCF rouvre ses guichets.

2001

2005

2024

Le Crédit Commercial de France est né en 1917, quand la Banque suisse et française (fondée en 1894) a fusionné avec la Caisse de crédit de Nice et la Maison Aynard & fils. Au début des années 1930, elle était la sixième banque française et la deuxième du secteur privé. Encore dans les années 1970 et 1980, le CCF, qui se revendiquait « la banque des réussites », avait une implantation significative, avec plus de 200 agences.

Quand en avril 2000 HSBC, la banque multinationale au double ancrage hongkongais et londonien, lance une OPA amicale sur le groupe CCF, aucun changement de nom n’est alors envisagé. Si le logo CCF arbore très vite le nœud papillon rouge et blanc du groupe HSBC, il faudra encore quelques années pour se convaincre de l’intérêt à bénéficier de la force de frappe de la marque HSBC : à l’époque le nom HSBC est encore peu connu des Français et se pose la question du passage d’une banque associée à une clientèle de notables de province (CCF) en une marque internationale (HSBC).

La mutation semble pourtant engagée quand sort, en 2003, une campagne publicitaire signée CCF affichant la promesse de marque d’HSBC « Votre banque partout dans le monde ». Et ce sera finalement le 8 novembre 2005 que toutes les enseignes CCF se métamorphoseront HSBC, avec une campagne de publicité à laquelle l’actrice Nicole Garcia prêtera sa voix. Plus de 10 millions d’euros seront investis pendant un an dans les spots radio, télé, presse écrite et salles de cinéma. Avant cela, sur l’année 2005, quatre salves d’annonces presse, toujours signées « CCF. Votre banque, partout dans le monde », avaient préparé le terrain en égrenant les 4 lettres HSBC, chacune associée à un bénéfice : « H comme Home Sweet Home », « B comme Business », « S comme Succès », « C comme Client ».

20 ans plus tard, HSBC France est en déperdition. L’ex-réseau CCF, dont le siège trônait alors sur les Champs-Élysées et qui avait été acheté 11 milliards d’euros en 2000, est cédé au fonds d’investissement américain Cerberus via sa filiale My Money Group à 1 euro symbolique après avoir été recapitalisé à hauteur de 1 milliard de dollars. Et, selon les experts, c’est la marque CCF qui restait le plus gros des actifs de la banque, le nom étant encore présent dans l’esprit de la cible concernée, avec une image positive. Jamais entaché de scandale et épargné par la crise financière (car disparu en 2008), ce nom hérité du passé entend donc porter des valeurs de solidité, d’histoire, de patrimoine et de proximité.

Et c’est ainsi que les 244 ex-agences HSBC France ont toutes été mises aux couleurs du CCF depuis ce 1er janvier 2024.

Si le nouveau CCF se rêve en banque patrimoniale à hauteur d’homme, la problématique sera quand même de réussir à installer une ancienne marque dans la modernité : le monde a changé avec la mutation des entrepreneurs en start-uppeurs devenus une cible très courtisée ; l’univers concurrentiel s’est diversifié avec l’arrivée des néo-banques en ligne.

Il faudra réussir aussi à gérer efficacement l’intendance de la transformation (transferts de comptes, de virements automatiques, nouvelles cartes de crédit, chéquiers, modification des comptes en ligne, etc.) et mettre en place de façon accélérée une offre de services (conseil) et de produits (placements, assurance-vie, contrats…) susceptibles de conquérir une clientèle particulièrement exigeante.

Enfin, on sait que la (re)naissance d’une marque s’inscrit dans le temps long. On peut se demander si ce sera compatible avec le tempo d’un fonds d’investissement comme Cerberus qui aspire probablement à revendre My Money Group, aujourd’hui rebaptisé Groupe CCF (qui possède aussi la banque en ligne My Money Bank), dans un délai court.