Longtemps décriée, la marque américaine semble encore avoir plus d’un tour dans son sac.
Crocs est une entreprise américaine de fabrication de chaussures, basée dans le Colorado. A l’origine (2002/2003), les trois fondateurs rachètent une petite usine québécoise (Création Foam) qui vient d’en lancer la fabrication, ainsi que le brevet des deux inventeurs, Marie-Claude de Billy et Andrew Reddyhoff, ingénieurs en chimie québécois. L’originalité est dénommée le Crostile, matière de plastique expansé qui a la particularité de ne pas glisser, d’être lavable, flottante et thermoformable. Il se dit même que ces chaussures de 124 grammes favoriseraient la circulation sanguine grâce à un talon orthopédique soutenant la voûte plantaire et une bride cousue sur le talon permettant de maintenir le pieds.
La marque a en tout cas créé un style particulier de chaussures en plastique, reconnaissables entre mille, et initialement conçues pour être portées à la plage ou en bateau. Dès 2003, la première année de production, 76 000 sandales sortent de l’usine. La popularité de ces nouvelles chaussures explose alors qu’Hollywood (Al Pacino, Jack Nicholson ou encore Teri Hatcher, entre autres) les adopte. Dès février 2006, les fondateurs de Crocs décident de passer à la vitesse supérieure en faisant entrer la marque sur le marché américain du Nasdaq. La capitalisation boursière dépasse alors le milliard de dollars, ce qui représente le plus gros appel sur le Nasdaq dans l’industrie de la chaussure.
Les Crocs deviendront à la fois des produits de mode pour fashionistas en quête de différenciation et des produits fonctionnels pour les professionnels du milieu hospitalier ou de la restauration.
Photos de personnalités portant des Crocs, parues dans l’Express en 2009
Le modèle Cayman, symbole de la marque, s’est répandu comme une trainée de poudre. Décliné en 25 coloris, il représente à lui seul 40 % des ventes en France. Mais la marque élargit peu à peu son offre et les chaussures de bateau des origines se déclinent au fil du temps en format ballerines, bottes et même chaussures d’hiver avec fourrures. Le rachat de licences permet aussi de proposer des chaussures à l’effigie de Mickey, Spiderman ou Dora l’exploratrice pour séduire les enfants, et d’autres encore à l’effigie des équipes de baseball ou de football américain pour les supporters. Plus récemment est même apparue une ligne de vêtements à partir d’un nouveau tissu dérivé du Croslite.
En 2002, Time Magazine classait les Crocs parmi les 50 pires inventions du monde. On a vu les internautes déverser leur haine sur les réseaux sociaux : I Hate Crocs ; le groupe Facebook « I Dont care How Comfortable Crocs Are, You Look Like A Dumbass » (Rien à faire que les Crocs soient confortables, t’as l’air d’un bolos !) qui compte 1,2 million de fans. Et des vidéos permettaient d’apprendre à les découper à grands coups de ciseaux.
Crocs a pour le coup à l’époque réagi assez intelligemment en réalisant des campagnes publicitaires pleines d’autodérision, dont le fameux « Ugly can be beautiful » (Le laid peut être beau).
La marque aura même réussi à obtenir une certaine respectabilité avec des associations assez inattendues, comme avec Balenciaga et sa paire de chaussures dotée d’une plateforme d’environ 10 centimètres présentée à la Fashion Week d’octobre 2017.
Depuis 2 ans, Crocs s’essaie aussi à des partenariats pour la commercialisation de sacs, de type banane ou sac de plage, vendus quand même parfois à plus de 250 euros.
Mais de plus en plus, la marque se recentre sur les licences (elle a fermé ses sites de production en propre – le dernier en 2018 en Italie, après celui du Mexique) et se concentre sur ses activités de vente en ligne (elle a fermé une centaine de ses 400 magasins en propre). Mais la croissance reste au programme : son plus grand parc logistique européen (35 000 m2) sera inauguré en avril 2021 à Dordrecht (Hollande).
Début des travaux du plus grand centre de distribution européen à Dordrecht
Comme quoi le laid peut vraiment être beau.
