Laurent Vincenti, dans une interview sur RFI, revient sur la philosophie des entreprises et sa vision des marques sensibles.
A l’heure où beaucoup d’entreprises soulèvent la question de leur raison d’être et de leur impact sur la société, il n’est pas inutile de prendre un peu de hauteur et réfléchir à la manière dont l’altruisme, la bienveillance et le primat de l’autre peuvent converger avec le monde de l’entreprise et les règles du capitalisme. Car tout cela n’est pas incompatible dans les faits. C’est en tout cas la thèse de « Bouddhisme et capitalisme : pour un capitalisme compassionnel », paru en 2019 et co-écrit par Bertrand Rossignol, docteur en histoire des religions, et Laurent Vincenti, brand designer, associé de Yuma.
Tout le monde connaît Laurent Vincenti à travers ses créations qui font partie de notre vie de tous les jours, comme par exemples les identités visuelles de Total, La Poste, BNP Paribas, Groupama…
Quelques logos et identités visuelles, créés par Laurent Vincenti
Lors d’une récente interview sur RFI, il montre que la dimension philosophique est intrinsèquement au cœur de son métier depuis plus de 30 ans : « Mon travail consiste à réfléchir avec les dirigeants sur ce qu’on appelle aujourd’hui la raison d’être : pourquoi cette entreprise existe, d’où elle vient et où elle va ; c’est ce qu’on appelle aussi la plateforme de marque, avec tous les éléments qui vont guider son avenir. Après, c’est le designer qui entre en jeu, avec la définition de l’ensemble des éléments qui vont constituer le territoire d’expression de l’entreprise ».
Sa conviction est que les entreprises ont besoin de philosophie pour participer à un monde meilleur. « Il est indispensable quand on travaille sur la destinée des entreprises d’avoir un appui philosophique solide de manière à guider les entreprises, à les aider à accompagner le monde qui est en train de changer vers une vision plus humaine, plus responsable, plus respectueuse. En France, on a l’habitude de séparer religion et économie ; mais on peut dire que le capitalisme est basé sur des croyances : en particulier que l’enrichissement va rendre fondamentalement heureux. Notre civilisation a créé un monde ancré sur l’argent, le profit, la consommation. La mécanique générale du capitalisme fonctionne plus ou moins, mais elle rend les gens profondément malheureux, elle crée des écarts impensables, elle détruit la planète. Il faut donc changer d’objet de culte. Le « capitalisme compassionnel » met au cœur l’humain et le bien-être. »
On voit bien aujourd’hui que la société est en train d’évoluer vers ce modèle, poussée notamment par les jeunes générations. « L’utopie s’arrête à partir du moment où l’on commence à agir. On est aujourd’hui dans une période-clé où la main est aux entreprises qui vont décider de l’avenir du monde. Les gens ont davantage confiance dans les entreprises, plus que dans les politiques. »
De quoi nourrir l’optimisme des praticiens de la marque, plus convaincus que jamais que la marque, en tant que ligne directrice et outil d’alignement stratégique, est un puissant levier d’action sur les entreprises et la société.