Le secteur de la restauration est probablement l’un de ceux ayant connu le plus grand nombre d’innovations depuis une quarantaine d’années.
Innovations dues à l’évolution des styles de vie, aux conditions d’une économie devenue progressivement en crise structurelle, à une sensibilité croissante aux phénomènes de mode, à l’ouverture à de nouvelles cultures culinaires, à le redécouverte du goût comme l’un des cinq sens du plaisir….
Du snack-bar au fast-food, de la ″nouvelle ″cuisine à la restauration à thème, pizzerias incluses, de la gastronomie japonaise aux plats Tex-Mex, que de chemin parcouru par rapport à l’offre proposée à nos prédécesseurs qui devaient choisir dans une gamme d’établissements plus limitée, s’échelonnant vite du restaurant étoilé aux gargotes de quartier.
Au début des années soixante-dix, Pierre et Jacques Blanc débutent leur carrière à la tête de plusieurs brasseries parisiennes de renom telles que le Pied de Cochon aux Halles, le Grand Café, boulevard des Capucines, près de l’Opéra, et l’Alsace, aux Champs-Élysées. Leur savoir-faire et leur dynamisme sont vite reconnus par la profession, les medias et, surtout le grand public. Ils deviennent les Frères Blanc, multiplient les acquisitions de nouveaux établissements, proposent des formules créatives groupant dîners et spectacles – les Soirées Privilège – et s’affirment comme ″des restaurants de nuit ouverts même le jour″. Le succès est au rendez-vous mais les deux frères ressentent au début des années 90 la nécessité de développer leur offre sur un créneau différent qui ne cannibaliserait pas leur réseau de grandes brasseries, réseau qui s’étoffera sensiblement avec le temps. La Fermette Marbeuf, le Procope, chez Jenny, le Petit Zinc, chez Charlot, la Lorraine notamment, entreront ainsi dans leur escarcelle.
Il y a une vingtaine d’années, le concept de la restauration de chaîne a le vent en poupe. Les Bistro Romain, Léon de Bruxelles, Buffalo Grill et autres Criée fleurissent à des emplacements souvent stratégiques. C’est au génie des deux frères Blanc que revient l’idée de proposer aux convives une cuisine française de tradition, à base de produis frais, dans un cadre cosy, chaleureux, évoquant plus une maison de famille à la campagne qu’une salle de restaurant traditionnelle, avec ou sans néons. Ce concept novateur est soutenu par un nom cohérent avec le positionnement, facteur de proximité : ces nouveaux établissements s’appelleront chez Clément, en référence au prénom de père de Pierre et Jacques, qui fut le créateur du mythique Pied de Cochon en 1946.
Le choix du lieu est fondamental pour la réussite d’une enseigne ; Le premier chez Clément ouvre ses portes tout près de la place de l’Opéra. Dix autres suivront sur les axes les plus fréquentés de la capitale, jusqu’à Boulogne Billancourt et à Bougival à l’emplacement rêvé de l’ancien Coq Hardi.
Dans chaque restaurant, l’on peut déjeuner ou dîner 7 jours sur 7 dans le décor de son choix, variant selon les maisons : salle à manger, bibliothèque, mercerie, cellier… voire, selon la saison, auprès d’un feu de bois, sur un patio ou sous une verrière colorée.
La carte est évolutive, les recettes étant toujours confectionnées sur place. Les animations sont liées aux fêtes et évènements traditionnels : Saint Valentin, Fête des mères, Pâques, Réveillons…ateliers de cuisine pour enfants.
Tout comme il existe des hôtels de charme, Chez Clément signera longtemps sa spécificité sur son marché par ce slogan pertinent : ″des restaurants de charme à prix cléments″ le rapport qualité, cadre, accueil, et service devant s’accommoder de tarifs abordables pour rester attractif.
Plus récemment, faisant cette fois appel au concept convivial de table d’hôtes, la signature des restaurants deviendra tout simplement ″chez Clément, restaurants d’hôtes″, hôte ayant opportunément le double sens de celui qui reçoit et de celui qui est reçu.
A l’évidence, le concept imaginé par les deux frères Blanc en 1992, a encore de beaux jours devant lui, comme un moment de douceur dans ce monde de brutes.
La chaîne de restauration (11 restaurants, 450 salariés, 35 millions d’euros de chiffre d’affaires vient cependant de changer de patron. Jusqu’à récemment détenu par un fonds d’investissement de la Caisse des Dépôts (Qualium), l’histoire du groupe Frères Blanc va se poursuivre de s’écrire sous la plume de Stanislas Dewynter, trentenaire qui multiplie les acquisitions dans le secteur depuis 1999. Encore étudiant à Dauphine, il transforme un ancien club house de tennis situé en face de son université en restaurant (le Kfé Court, rebaptisé le Dauphine en 2009). En 2002, il reprend le restaurant du Rond Point des Champs Elysées ; en 2006, il ouvre un deuxième Kfé Court dans le 17ème arrondissement (place Pereire), puis obtient la concession du restaurant des Jardins de Bagatelle dans le Bois de Boulogne. En 2007, c’est l’ouverture du Saut du Loup au musée des Arts Décoratifs de Paris (120 places), puis Le Tir aux Pigeons (encore au Bois de Boulogne), L’Aubette, l’hôtel Ermitage à Saint-Tropez, L’Elysée Lounge, First Avenue,…
Avec Chez Clément, Stanislas Dewynter (SDW Services) s’impose comme un acteur incontournable du secteur, avec 25 établissements, 70 millions d’euros de chiffre d’affaires, 900 personnes) et arrive au niveau du groupe Bertrand (La Gare, Délicieux, L’Ile, Brasserie Printemps, Angelina,…), du groupe Flo (Hippopotamus, Bistro Romain,…), de Bistrot du Boucher, de La Boucherie, etc.