Après s’être massivement développées en périphérie, jusqu’à l’overdose, les enseignes de distribution et les réseaux reviennent peu à peu à la conquête des centres villes. Le multi-format permet de s’adapter à la diversité des besoins et de verrouiller la stratégie de contact avec les consommateurs.
Même si le phénomène n’est pas véritablement nouveau, c’est sans doute Carrefour qui a véritablement marqué en 2010 cette nouvelle tendance à la déclinaison de la marque-enseigne dans différents formats, sous l’impulsion de Lars Olofsson. Le développement de l’enseigne sous différents labels (Carrefour Market, Carrefour City, Carrefour Contact, Carrefour Montagne) est sans doute ce que le PDG de l’époque, spécialiste du marketing, avait fait de mieux (même si son successeur, Georges Plassat, tend à atténuer quelque peu cette initiative). Selon l’appellation du magasin, l’offre est adaptée, de même que la politique de prix, mais la stratégie a le mérite d’être facilement décryptable par les consommateurs.
Monoprix, avec ses formats complémentaires Monop’, Monop’daily, ou Monop’beauty, s’inscrit dans la même mouvement de fond.
Au-delà des enseignes alimentaires, nombreux sont les autres réseaux qui suivent cette tendance, de façon plus ou moins aboutie.
But a lancé il y a quelques années le format But City, destiné aux centres villes des grandes métropoles. Dans ce magasin, les clients trouvent surtout de la décoration mais peuvent tout de même acheter des produits électroménagers grâce aux bornes interactives. Conforama, avec Confo Déco, a tenté de s’adapter au marché parisien en se focalisant sur la décoration et l’aménagement du séjour, des chambres et de la cuisine.
Fnac a, quant à elle, développé depuis 2 ou 3 ans des formats de taille plus petite sous forme de franchise.
Plus récemment, certaines enseignes de bricolage semblent se rendre compte que les grandes cathédrales (ou les grands entrepôts) de périphérie ne sont plus suffisant(e)s pour satisfaire les consommateurs. Vente par internet, drive, mais aussi formats plus petits de proximité sont les leviers d’une stratégie de contact optimisée.
Si le marché du bricolage semble disposer encore d’un potentiel de croissance (progression du nombre de ménages, intérêt des Français pour l’aménagement de leur habitat, tendance au « do it yourself », élargissement de la cible au-delà des bricoleurs expérimentés,…), cette croissance semble quand même limitée par la structuration de la distribution. Elle doit en effet sur ce secteur repenser l’offre et les concepts pour se différencier et capter une cible diversifiée, avec des niveaux d’expertise de plus en plus hétérogènes.
L’échec des grandes surfaces alimentaires dans le domaine du bricolage démontre notamment que le seul argument prix ne tient pas. La tendance est à la mise en place de politiques plus différenciées, par exemple avec des services variés (livraison/pose et location de matériel récemment mis en place par Mr Bricolage, développement de la livraison à domicile chez Lapeyre, location d’utilitaires en libre-service pour Castorama,…) et la multiplication de l’assistance ou des conseils sous toutes ses formes (fiches conseils, formations en points de vente, tutoriels en ligne, etc.). Dans son nouveau concept de points de vente, Castorama mise sur le numérique (bornes tactiles, service de conception 3D, réalité augmentée,…) pour accompagner le client.
Mais surtout, à côté des formats « universalistes », se développent des concepts plus segmentants : magasins de centre-ville (Brico Pro Relais, Weldom, Mr Bricolage), points de vente adaptés aux spécificités géomarketing locales (Bricomarché) ou centrés sur une offre spécifique à l’instar de Kbane (habitat durable) et Zôdio (décoration) développés par le groupe Adeo.
Le système de distribution qui semble devoir se développer consiste à multiplier les points de contact de proximité (par exemple en s’appuyant sur la franchise ou l’affiliation, notamment en centre-ville) autour d’une plateforme régionale pilote qui fait office de flagship régional de la marque.
Mais peu d’enseignes ont pour l’instant mis en place cette organisation. La plupart développent des points de vente multi-format sans vraie stratégie de marque, un peu au hasard des opportunités, sans organisation centrée sur le maillage géographique, parfois même sans réflexion sur l’architecture de marque. Derrière un magasin à l’enseigne Fnac par exemple, on peut aussi bien trouver un mégastore de 15 000 m2 (Fnac des Ternes), un magasin de 800 ou 1000 m2 (pour les récentes franchises), voire de 300 m2 (pour la franchise de Melun), ou encore un local de 100 m2 dans certaines gares ou les zones duty-free d’aéroports. On aurait au moins pu imaginer qu’un système d’appellation de type Fnac / Fnac.com / Fnac City ou Fnac Contact / Fnac Travel ou Fnac Relay rende les choses plus lisibles pour le consommateurs.
Le modèle du multi-format est encore en train de se chercher.